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Assurance pandémie : le « CATEX » n’est plus

Affaires - Assurance
12/01/2021
Un régime d’assurance pandémie obligatoire pour les entreprises en cas de fermeture administrative imposée ne verra pas le jour dans un avenir proche. En revanche, Bercy a obtenu quelques concessions de la part des assureurs pour l’année 2021.
 
Une année faite de promesses

Le nouveau régime d’assurance, censé de couvrir les entreprises des risques pandémiques, n’a cessé de défrayer la chronique, elle-même alimentée en permanence par l’opposition entre les assureurs et les assurés sur le fond d’indemnisation des pertes d’exploitation.

Le groupe de travail constitué ad hoc a rendu ses propositions le 16 juillet 2020, exposant les diverses options envisagées ainsi que les difficultés de création. Sans nouvelle depuis cette date, Bruno Le Maire, le lendemain de l’annonce de l’instauration du couvre-feu le 15 octobre, avait affirmé que le nouveau régime serait finalisé dans « les prochaines semaines ».

Finalement, le 26 novembre, la Fédération Français de l’Assurance (FFA) s’est prononcée sur les proposition émises. Sans surprise, clairement en faveur des assureurs, le régime « CATEX » ainsi présenté risquait de déplaire tant aux assurés qu’à l’État : le dépassement des limites prévu dans le projet serait à la charge de la puissance publique tandis que la franchise, la durée maximale et le plafond d’indemnisation laisseraient les entreprises assurées vulnérables. Selon la FFA, ce régime serait obligatoire et s’attacherait à la garantie « Incendie » souscrite par toutes les entreprises.

Projet de l’assurance pandémie obligatoire abandonné

Une chose est désormais certaine : il n’aura pas - du moins dans un avenir proche - de régime assurance pandémie obligatoire.

Dans une déclaration prononcée à Paris le 7 décembre, Bruno Le Maire a pu affirmer que : « J'ai entendu les inquiétudes de toutes les entreprises, PME, TPE, entreprises de taille intermédiaire ou grands groupes qui ne veulent pas de charges nouvelles et qui estiment que, dans la période actuelle de crise économique, une charge nouvelle serait tout simplement insupportable pour elles. Il n'y aura pas, par conséquent, d'assurance pandémie obligatoire, mais il y aura la faculté, pour tous ceux qui le souhaitent de se constituer des provisions qui bénéficieront d'un régime fiscal particulièrement avantageux, qui leur permettront tout simplement de mettre de l'argent de côté dans les temps où les choses vont bien pour l'utiliser une fois encore dans des conditions fiscales particulièrement avantageuses si jamais une nouvelle pandémie devait survenir ».

Bercy s’est d’ailleurs félicité d’avoir obtenu trois engagements des compagnies d’assurances. Elles se sont d’abord engagées à geler pour 2021 les cotisations d'assurances multirisques professionnelles des secteurs de l'hôtellerie, des cafés et de la restauration et à élargi aux secteurs de l'événementiel, du tourisme, du sport et de la culture. Ensuite, ces entreprises bénéficieront gratuitement cette année d’une couverture d'assistance pour les chefs d'entreprise et pour les salariés quand ils ont été touchés personnellement par le coronavirus. Enfin, les assureurs se sont engagés à mettre en place une médiation des assurances pour les entreprises. Cette dernière fait sans doute écho aux nombreux procès intentés par les entreprises contre les assureurs.

Pour remplacer le régime obligatoire mort-né, « il y aura la faculté, pour tous ceux qui le souhaitent de se constituer des provisions qui bénéficieront d'un régime fiscal particulièrement avantageux, qui leur permettront tout simplement de mettre de l'argent de côté dans les temps où les choses vont bien pour l'utiliser une fois encore dans des conditions fiscales particulièrement avantageuses si jamais une nouvelle pandémie devait survenir », affirme Bercy.

Un accord sans solution

Néanmoins, l’autosatisfaction à peine cachée de Bruno Le Maire dans son discours ne saurait empêcher l’amertume de certains intéressés face à cette solution « fiscale ».

En effet, certains représentants des professions concernées pensent qu’il s’agit davantage de « mesurettes » que de mesures de nature à les aider à surmonter la crise. Certes, le nouveau régime en gestation n’avait pas pour objectif de couvrir les pertes liées à la crise actuelle mais la constitution des provisions, même aux conditions fiscales avantageuses, n’est pas pour autant la solution attendue. En particulier pour les TPE les plus touchées par la crise : avant de pouvoir mettre de côté en cas de crise, faut-il encore avoir les moyens de le faire… 

Pour mémoire enfin, si Bercy a tant insisté sur l’élaboration d’une assurance pandémie obligatoire, valable en cas de fermeture administrative imposée, c’est précisément pour apaiser les esprits de centaines de milliers d’entrepreneurs qui ont subi des pertes substantielles. Il est intéressant de se souvenir que dès le départ les assureurs étaient hostiles à un tel système d’assurance généralisé obligatoire en prétendant que le risque pandémique n’est pas assurable.

En fin de compte, il s’agit d’une solution profitable dans une certaine mesure à l’État (du moins politiquement), avantageuse pour certaines entreprises et satisfaisante pour les assureurs avec quelques concessions toutefois. Faudra-t-il attendre la fin du quinquennat pour qu’un dialogue pour une solution solide et durable s’instaure enfin ?
 
Source : Actualités du droit